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L'épilepsie en Ukraine : Un mal ignoré

08.04.2015

 

On le sait, 5% de la population est susceptible d’avoir une crise de type d’épilepsie dans sa vie, mais seulement 1% sont réellement considérés épileptiques quand ces crises se répetent. Les premières crises apparaissent en général durant l’enfance, néanmoins, il y a aussi des origines familiales, vasculaires, traumatiques, dégénératives ou tumorales qui peuvent déclencher la maladie, y compris à l’âge adulte voire après 65 ans.

En Ukraine, il y a peu ou pas de statistique sur l’épilepsie qui, pour beaucoup, est encore considérée comme une maladie mentale, alors qu’elle est liée à un dysfonctionnement « électrique » du cerveau. Mais il y a probablement entre 300 et 500.000 personnes épileptiques dans le pays.

Sur l’origine de la maladie, les problèmes rencontrés par les ukrainiens pour soigner l’épilepsie sont :

-        La grossesse et l’accouchement :

Il y a souvent un manque d’information sur le déroulement réel de la grossesse, de l’accouchement et des premiers jours de la vie des enfants en Ukraine. En effet, il suffit de quelques instants de mauvaise oxygénation pour créer des lésions cérébrales qui peuvent être ensuite le foyer de crises d’épilepsie, ou, plus grave, d’incapacités psychomotrices. Il peut se produire aussi avant et après la naissance une infection (encephalite, meningite, rubéole, toxoplasmose, herpès…), un accident vasculaire cérébrale, une thrombose des sinus, une anomalie cérébrale fœtale, un déséquilibre de certains taux sanguins, une conséquence de la prise de drogue, de toxiques ou de médicaments par la mère,…

Selon notre expérience, en Ukraine, seuls 5% des parents des enfants qui ont eu un problème pendant la grossesse ou à la naissance semblent réellement informés et il n’y a donc pas de suivi particulier durant l’enfance pour les autres.

-        Dans le cas des épilepsies, ce ne sont pas toujours les crises qui se déclenchent tôt qui sont les plus graves, chaque cas est différent et doit être diagnostiqué correctement, et les neurologues de bonne qualité sont trop peu nombreux en Ukraine, moins d’une trentaine,

-        Toutes les épilepsies ne nécessitent pas obligatoirement un traitement, mais plutôt une surveillance médicale régulière, et les thérapeutes ne sont pas formés à ces suivis

-        Les épilepsies qui passent inaperçu :

Un tremblement, une contraction musculaire incontrôlée, une absence, des problèmes de vision, une hallucination,… sont pourtant les signes d’un dysfonctionnement du cerveau, et dans certains cas, annonciateurs d’une épilepsie. Or, les thérapeutes ne font pas toujours le lien essentiel avec une possible épilepsie, alors qu’il existe des moyens simples de le diagnostiquer.

-        De fortes fièvres durant l’enfance, mal maîtrisées, avec des convulsions peuvent aussi être le signe précurseur d’une épilepsie, mais les parents, les proches, et le patient hésitent à en parler,

-        Contrairement à la France, il n’existe pas en Ukraine de vrai centre de diagnostic permettant d’identifier avec certitude une grande partie des causes des épilepsies. En effet, ces centres comme il en existe moins d’une dizaine en Europe disposent au même endroit d’outils de diagnostiques nombreux tels que :

  • Les Electro Encephallo Grammes posés durant plusieurs heures, voire, plusieurs jours,
  • Le monitoring EEG Vidéo permettant de capter l’image et le traçé d’une crise,
  • Les IRM de bonne qualité avec des possibilités de réconstitution 3D,
  • Les Angio IRM pour les problèmes vasculaires,
  • Des examens IRM Fonctionnels, permettant d’isoler au mieux la zone responsable des crises et les zones alentours,
  • Un PETSCAN qui identifie la nature d’une éventuelle lésion et les problèmes vasculaires,
  • Un SCANNER à la recherche de tumeurs ou de problèmes vasculaires,
  • Le SEEG, qui fonctionne sous la forme d’implants et enregistre le fonctionnement du cerveau durant plusieurs jours dans les cas de lésions importantes,
  • Un laboratoire d’analyse biologique permettant le dosage d’éléments spécifiques à certaines épilepsies et permettant aussi de doser l’efficacité d’un traitement,
  • Un laboratoire de génétique permettant d’identifier une origine familiale,
  • Des neuropsychologues qui identifient les problèmes psychologiques et moteurs liés à la maladie, son origine, ses conséquences, et l’efficacité ou non d’un traitement,
  • Et surtout une équipe complète de spécialistes qui travaillent ensemble à résoudre le problème de chaque patient.

-        D’une façon générale, les niveaux de certains éléments sanguins, pourtant très importants, ne sont pas du tout vérifiés en Ukraine (troubles métaboliques, glycémie et anoxie). C’est le cas, par exemple, de la Vitamine D dont le rôle est pourtant important dans le déclenchement et la durée des crises de certaines épilepsies surtout pour les malades déjà sous traitement.

-         L’origine de certaines épilepsies reste pourtant inconnue, mais dans un pays européen, un traitement personnalisé permettra d’améliorer la qualité de vie jusqu’à 90% des patients, ce qui est loin d’être le cas en Ukraine où le taux est plus proche de 20 à 30 %.

-        En Ukraine, les médecins spécialistes sont assez isolés alors que la décision d’un traitement et encore plus d’une intervention chirurgicale doit être collégiale. Elle doit impliquer le neurologue, le médecin de famille, éventuellement le chirurgien, le neuropsychologue et le radiologue. Or, ce type de lien n’existe pas, même si, individuellement il existe quelques bons professionnels en Ukraine, souvent formés à l’étranger.    

-        En Ukraine, de nombreux médicaments contre l’épilepsie couramment utilisés en Europe et aux USA ne sont pas disponibles, ainsi on considère approximativement que 7/8 patients sur 10 n’ont pas de traitement réellement adapté à leur situation. L’organisation opaque liée à l’enregistrement des médicaments en Ukraine empêche certains produits très efficaces d’être mis à disposition des malades.

-        De plus, certains produits ne sont disponibles qu’en doses adultes, ce qui oblige les parents d’enfants épileptiques à se transformer, plusieurs fois par jour, en préparateurs en pharmacie pour administrer le bon dosage du médicament

-        A cause d’un manque de confiance dans les médecins locaux, les parents et les patients modifient eux même les dosages avec les risques toxicologiques que cela peut présenter.

-        Il faut aussi préciser que les traitements contre l’épilepsie ne sont pas obligatoirement coûteux, sauf dans le cas de produits nouveaux à production limitée, contrairement aux idées répandues par les médecins eux mêmes.

-        Les copies ou les génériques de produits contre l’épilepsie (trop nombreux en Ukraine) doivent être aux normes européennes car il existe un danger de surdosage, ou d’effets secondaires très graves.

-        En Ukraine, il existe depuis peu la vente par internet ou par des intermédiaires locaux de médicaments qui ne sont pas disponibles en Ukraine, trois à quatre fois plus chers que leur prix d’origine. Or, une partie de ces produits, peuvent être des copies inefficaces ou même dangeureuses.   

-        Un traitement contre l’épilepsie peut évoluer, augmenter, diminuer voire être arrêté provisoirement ou définitivement. Un suivi par le même neurologue ou par la même équipe est donc indispensable pendant plusieurs années. Il y a par exemple des médicaments qu’il faut absolument arrêter pour envisager une grossesse. Chaque année quelques nouveaux médicaments plus performants peuvent remplacer d’autres molécules. La plupart des ces produits sont pris avec un dosage progressifs et ils sont aussi arrêtés ou diminués d’une façon progressive. Les patients ne sont pas systématiquement informés et rappelés par leur médecin en raison du faible nombre de spécialistes et la méconnaissance de l’anglais pour une bonne partie d’entre eux.

-        Certains adultes, et ils sont plus nombreux qu’on le croit, ont des séquelles de l’épilepsie qui a été traitée ou pas durant leur enfance. Votre conjoint, votre ami, votre collègue peuvent présenter des signes secondaires de leur épilepsie. Des absences, des hallucinations, des tremblements involontaires, le regard qui dévie, des TIC, c’est le signe que la maladie est peut être toujours là, et qu’elle peut s’amplifier à tout moment et devenir plus grave. L’accouchement peut par exemple déclencher pour la mère une épilepsie qui passait auparavant totalement inaperçue. Il faut dans ces cas là retourner consulter un neurologue qui pourra dire si oui ou non, il s’agit d’une épilepsie et quel traitement doit-on envisager.

-        D’une façon générale, les épileptiques en Ukraine ont honte de leur situation et n’osent pas en parler, y compris à leur famille proche. Il s’agit probablement d’un héritage mental de l’époque soviétique où les épileptiques étaient souvent envoyés contre leur gré en centres spécialisés ou déclarés inaptes à toute activité.

-        Les parents se sentent coupables que leur enfant soient épileptique, alors qu’il n’y a souvent aucune raison. Cette culpabilité se transforme souvent en colère vis-à-vis des médecins qui n’arrivent pas ou peu à réduire les crises ou à identifier la cause. Mais là encore, il n’y a pas assez de soutien psychologique pour les familles ou de groupes de parents qui pourraient être une solution à ce problème.

-        Il y a parfois des causes hériditaire, mais elles sont rares (moins de 10%) mais impossibles à diagnostiquer en Ukraine,

-        Le business de la détresse : Les parents comme les patients sont souvent desespérés de n’avoir pas pu trouver une solution à leur épilepsie en Ukraine, certains escrocs en font leur commerce, l’épilepsie ne se soigne pas avec des plantes, des produits exotiques ou des prières, mais il y a parfois un lien direct entre l’alimentation et les crises, sauf qu’en Ukraine, aucun diététicien n’est capable aujourd’hui d’en parler.

-         Certaines épilepsie sont des effets de pathologies beaucoup plus graves mais l’objectif est d’améliorer la qualité de vie du patient. Dans ce domaine, les connaissances en matière de traitements à base cortisone, ou des diètes cétogènes sont mal connus en Ukraine. 

-        Attention aux « robots miracles », certaines machines existent en Ukraine et revendiquent contre un budget important, la possibilité de détruire une tumeur ou de la bombarder sans une intervention chirurgicale, mais cela doit être fait dans un contexte très sérieux et seulement pour des tumeurs cérébrales inférieures à 30 mm. 

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